mardi 26 avril 2011

LE BUCHERON ET LES LUTINS

Il y avait dans un coin du Gers, une placita entourée de coteaux joliment colorés par les premières pousses printanières, dont les senteurs venaient se mélanger à quelques effluves d'Armagnac. Sur l'ovale de sable, s'étaient donnés rendez-vous six quadrupèdes cornus, un bûcheron et deux lutins.

Six toros cinquenos de la maison Baltasar Iban, tous encastés (sauf le 5, genuido), tous présents sous le fer (deux piques chacun; une seule, longue, pour le 4) en s'employant activement, tous avec une noblesse piquante, ni soseria, ni tonteria (sauf le 5, à la charge très courte et peu avare de coups de tête), tous de belle présentation.
Un lot de qualité qu'il conviendra de ne point oublier à l'heure des bilans de fin de temporada !!

Jean Joseph "Pas de lidia", bûcheron de son état et accessoirement torero, a encore ses partisans. Ceux-ci furent déçus de ne pas le voir banderiller son premier toro parce que "Môssieu" fut fâché d'entendre quelques sifflets "saluer" ses absences de mise en suerte, laissant, par deux fois, partir l'animal, sans aucun placement, vers le cheval. Les mêmes s'enthousiasmèrent devant les trois paires posées, à cornes passées, au second toro et s'en allèrent, sans complexe aucun, demander une seconde oreille (justement refusée par la présidence) après une faena construite d' un monton de passes délivrées au large (le cul à Vic, la muleta à Eauze !!) et sur le voyage du bicho. Une entière d'effet rapide remata l'ouvrage de l'ex cyclone de Jerez.

Les deux lutins quant à eux, ne s'en laissèrent pas compter. Chacun avec ses moyens et tous deux plein de courage, ils ne firent point de toreo d'illusion face à ce bétail qui demandait des papiers en cours de validité.
Julien " Lou Lescarret" et Alberto " L'aigle" s'arrimèrent quand cela s'avéra nécessaire (face aux 5 et 6), délivrèrent des muletazos sincères et dominateurs et furent récompensés de leurs louables efforts après des estocades engagées et efficaces.

Cette année "Aignan y Toros" a justifié son nom. On serait tenté d'y rajouter : "con dos Toreros".

Juan Jose Padilla :Silence - 1 oreille avec forte pétition de seconde
Julien Lescarret : Vuelta après légère pétition - 1 oreille
Alberto Aguilar : 1 oreille - 1 oreille avec légère pétition de seconde

Miguel de Burdeos

mardi 19 avril 2011

DECEPTION ET ESPERANCE

Une foule aux senteurs estivales avait copieusement garni la placita béarnaise de Garlin. Le bi-centenaire de la tradition taurine y était fêté en célébrant une novillada à la mode Goyesque.
Outre ces agréables considérations décoratives, que restera-t-il de cet anniversaire ?

Un lot de novillos marqué des deux fers de Joselito (quatre de la ganaderia La Reina, deux de l'élevage d'El Tajo) qui se comportèrent tel le bon toro "moderne". Peu ou très peu de présence au premier tiers et une noblesse à la tonteria affirmée. Vous savez le fameux toro "con-con" qui suit naïvement tout bout de tissu qui se présente devant lui. Avec, toutefois, un bémol pour le 6, mansote au début, qui par la suite développera du sentido à en devenir presque intéressant !!
Ajoutez à cela une présentation de qualité passable (des armures alternant entre le brocho et le gacho) et les produits 2011 de Jose Miguel Arroyo ne resteront pas dans les mémoires.

Déception également entretenue par certains bipèdes. Juan del Alamo se comporta comme la pseudo figurita qu'il n'est pas encore, en offrant un toreo relevant plus de l'ennui (le sien et le notre !!) que de l'extase. S'il te plait Juan redevient le lidiador sincère et inspiré avec ce petit côté baroque qui avait, il y a quelques mois, laissé entrevoir un futur grand torero !!
Mario Dieguez, présenté comme un torero de arte, nous gratifia de deux faenas où l'accumulation de passes sans inspiration se partagea avec l'absence chronique de dominio sur l'animal.

Heureusement, Alberto Lopez Simon apporta son envie et sa créativité. Certes, on pourra ne pas apprécier l'excès de toreo génuflexionné ou contester (à juste titre) une deuxième oreille obtenue après une épée extrêmement basse mais il convient de reconnaître la qualité de ses derechazos templés et l'arrimon dans un toreo encimista, pour construire une faena agréable et courageuse, face à l'âpre sixième novillo.
Et que "l'érudit" qui se défoula en gueulant "pico" à ALS vienne lister les toreros qui aujourd'hui (et malheureusement !!) n'utilise pas, à un instant de leur faena, la pointe du palillo. Ils se comptent sur les doigts de la main, en partie amputée, d'un menuisier maladroit !!
Et pourquoi pas les mêmes "commentaires" à l'égard de JDA ? Il est vrai que ce dernier fut, dans un passé récent, l'icône d'une certaine intelligentsia taurine !!
Alberto Lopez Simon propose un toreo d'inspiration Talavantesque parsemé d' effluves Tomasiste qui demande à être affiné et débarrassé de quelques scories superflues. Qu'il garde cette fraîcheur et cette personnalité qui font tant défaut à beaucoup de ses compagnons d'escalafon.

Miguel de Burdeos