jeudi 28 janvier 2010

YONNET

Dans le lointain, des montagnes à la blancheur saline déchirent un horizon maritime. Fouettés par un froid mistral, les grains de sable d’une plage motorisée accompagnent, dans les airs, le vol des échassiers au rose plumage. Les eaux du Vaccarès emportent dans leurs profondeurs une partie de l’âme de ceux qui ont pris le temps de s’arrêter les contempler. Et un regard tourné vers l’intérieur des terres offre l’immensité écrasante du Ventoux.

Au Salin, sous les platanes, la placita aux murs ocres espère des toros.
A l’entrée du chemin, le panneau de bois, peint de vert, indique « La Bélugue ».
Marqués, sur leur gauche, du i grec de la famille Yonnet, des animaux à la fière beauté paissent sereinement dans les prés.
Il est des histoires âgées de 150 ans. Elles inspirent le respect !!….

Miguel de Burdeos

mardi 26 janvier 2010

TOREROS

Arte y valor. Art et courage. Termes employés pour définir un torero. Classification simpliste. Elargissant l’éventail, j’ajouterai les toreros techniciens et les bullidors / tremendistes.
Toutefois, il convient d’admettre que certains peuvent naviguer dans plusieurs groupes, au gré des courants et…. de leur comportement dans l’arène !!

Les toreros artistes peuvent se compter en deux sous-groupes. Toreros de détails et toreros de sentiments.
Les premiers sauront par une véronique, un pecho, une trinchera, une inspiration créatrice passagère émouvoir une partie des gradins. Le duende les habite ; le superficiel aussi !!!
Hier Curro Romero, aujourd’hui Javier Conde, Julio Aparicio.
Les seconds, plus profonds dans une expression globale de la lidia et de leur toreo (ils ne se complaisent pas dans un geste isolé comme les précédents) font ressortir, lors de l’affrontement avec l’animal, les sentiments multiples qui les habitent, traçant ainsi une œuvre complète, très personnelle, non pré-formatée et, pour celui qui sait ou veut la voir, matérialisant les tourments intérieurs de son créateur.
José Antonio Morante Camacho, dit Morante de la Puebla, illustre à merveille le toreo de sentimiento. Daniel Luque semble avoir les moyens d’être présent sur ce terrain ; il n’est qu’à apprécier son toreo de capote.

Toreros de valor. Comment définir le courage du torero ? Descendre dans le ruedo n’est-il pas, en soit, un acte courageux ? Ainsi donc, tous seraient-ils toreros de valor ? Non, car tous n’iront pas affronter des animaux de respect, toros d’encastes « délicats ». De même, tous n’iront pas positionner leur corps dans des sitios improbables, endroits où d’autres ne risquent pas même, une main !!!
Les premiers, guerriers parmi les guerriers, n’ont souvent d’autre choix que de s’arrimer, devant du bétail de respect, dans un toreo de verdad, sincère et dépouillé. En haut de cet escalafon : El Fundi, Sergio Aguilar, Rafaelillo. Aspirant prometteur : Alberto Aguilar.
Attention toutefois, à ne pas se méprendre et confondre ces lidiadores, toreros d’honneur, avec quelques pseudo-guerriers, souvent imitateurs, rarement à la hauteur. Les vrais guerriers ne reculent pas !!!
Toréer sur le voyage un Miura encasté ou un JPD acidulé, c’est toujours toréer sur le voyage !!
Les seconds osent se positionner dans des sitios où le risque n’a d’égal que le dominio exercé sur l’animal. Il peut éventuellement, leur être reproché un excès de toreo encimista (de proximité). Si celui-ci se développe sur le terrain du toro n’est-il pas l’essence même du combat, à savoir, dominer l’adversaire ? Pour remporter le combat, il faut dominer. Pour dominer, il est nécessaire d’aller chez l’opposant.
Paco Ojeda, José Tomas, Sébastien Castella, Miguel Angel Perera, Alejandro Talavante (plus irrégulièrement pour ce dernier) ont initiés de nouveaux sitios.

Les toreros techniciens ont en commun grande connaissance du toro et extrême aisance dans l’utilisation du leurre. Diffère l’expression de leur technique.
Chez les uns, tel Enrique Ponce, prime l’esthétique corporel des mouvements et les attitudes à la plasticité irréprochable, au détriment, parfois, d’un réel dominio exercé sur l’animal. Quand la faena, en manque de sincérité, s’apparente à un concours de cambrures exagérées, dignes du « Caballo Loco », est-ce encore du toreo ?
Chez d’autres, la technique se traduit dans le poder, la puissance du toreo. Les toreros poderosos imposent et s’imposent devant l’adversaire. La muleta maîtrisée devient maîtresse du ruedo. Maestros de poder d’hier, d’aujourd’hui ou de demain : Cesar Rincon, El Juli, Ruben Pinar.

Ultime groupe, celui des toreros bullidors et/ou tremendistes dont la qualité (?) première est de toréer le public avant de se préoccuper de l’animal. Mettre le feu aux « étagères » en provoquant la foule, se positionner au milieu des pitones pour faire frémir de peur (!!!..??..) la gent féminine et quelques représentants de la masculinité, nous entraîne loin du toreo de verdad, pour nous enfoncer dans les sombres abysses du destoreo, là où il sera possible de croiser ce cartel de « gala » : Juan José Padilla, Antonio Ferrera, Mehdi Savalli …

Inventaire non exhaustif, chacun(e) pourra le compléter, voire le rectifier, au vu de ses propres sensibilités.
Toreros de valor et de poder ont mes préférences, ainsi que toreros de sentiments, lorsqu’ils n’inversent pas les bœufs et la charrue (le toro et la muleta, si vous préférez !!!).
Choix discutables ? Assurément !!!! Basés sur une vision simple du toreo : dans un premier temps, combat et dominio, ensuite … si possibilité il y a, ….. arte !!!!

Miguel de Burdeos

mercredi 20 janvier 2010

PUERTA GRANDE

Alors que l’ébauche de certains cartels de la temporada à venir commence à être dévoilée, on note déjà, les premiers jets de venin délivrés par la cuadrilla des sempiternels insatisfaits.Ici, un élevage qui n’aurait rien à faire dans telle plaza. Là, un éleveur qui afeite ses toros. Ailleurs, une ganaderia qui devient trop « commerciale ». Et j’en oublie !!!Aussi, en tant que membre de la cuadrilla des éternels rêveurs utopistes, poserai je quelques questions.

Au nom de quelle intolérance, les toros d’Alcurrucen, d’encaste Nunez, ne pourraient-ils pas fouler le ruedo Vicois, lors de la prochaine corrida-concours Pentecostale ? Un des principes élémentaires d’une concours n’est-il pas d’apprécier la diversité des encastes ? D’autres encastes, fort appréciés au demeurant, n’ont-ils jamais présenté du bétail de piètre qualité, y compris à Vic, sans que la cuadrilla des perpétuels persifleurs ne manifeste son opprobre ?

Qui en matière d’afeitado est légitime pour déterminer et affirmer la réalité des faits ? Qui objectivement, sait faire la différence entre afeitado et arreglado ? Là où même les spécialistes que sont les vétérinaires ont des avis divergents (abusés qu’ils peuvent être, notamment par les nouvelles « techniques », ex. : « fundas »), de quel droit la cuadrilla des aficionados lambda peut-elle énoncer un avis assurément définitif ? Les seuls et uniques détenteurs de la vérité en la matière ne sont-ils pas celui (ceux) qui ordonne(nt) et celui (ceux) qui exécute(nt) ?

Qu’est-ce qu’une ganaderia dite « commerciale » ? Si la réponse est : celle qui vend beaucoup de bétail !!!.. alors Victorino Martin, lidiant une vingtaine de courses par saison, n’est-il pas, depuis plusieurs années déjà, un ganadero commercial ? Et, si l’on considère « commerciaux » les Victorinos « adoucis » vus en 2009 à Dax ou Arles, peut-il en être de même pour ceux sortis à Beaucaire ou Logrono ? Pourquoi de pas vouloir admettre qu’une camada larga est composée de diverses « familles », certaines « piquantes » et d’autres moins ?

Laissons les ganaderos élever, les empresas organiser, les toreros toréer. Il sera bien temps, pour l’aficion, après chaque toro, de chaque corrida, de chaque féria, de chaque temporada de commenter et critiquer. Commenter et critiquer, oui !! … mais avec connaissances et honnêteté !!!
Les polémiques stériles, attaques gratuites, souvent infondées et peu argumentées, lancées par quelques auto-proclamés « gardiens du temple », élèvent rarement ceux qui les dispensent.
Ainsi, les portes du temple ne deviennent-elles pas, parfois, une impasse sans issue pour qui préfère l’obscurité des chiqueros à la lumière de la …. puerta grande ?

Miguel de Burdeos

lundi 18 janvier 2010

NAVARRA / NAFARROA


Dans un pueblo de Navarre,
La plaza, longtemps j’ai cherché,
Entre deux immeubles et quatre maisons, cachée.

Dans un pueblo de Navarre,
Trop tard pour l’encierro matinal,
Les toros attendent dans les corrals.

Dans un pueblo de Navarre,
Un surprenant alguazil de blanc et rouge,
Festayre sur un cheval qui bouge.

Dans un pueblo de Navarre,
Le visage pas inconnu
D’une rencontre inattendue.

Dans un pueblo de Navarre,
Au final, des souvenirs,
San Miguel et quelques sourires.

Dans les pueblos de Navarre,
Encierros, toros y aficion.
Férias, penas y emocion.

Dans les pueblos de Navarre,
Lodosa, Peralta, Tudela,
Fitero, Estella, Corella…

Miguel de Burdeos

jeudi 14 janvier 2010

RETOUR VERS DEMAIN

Vous le reconnaissez ?

Trapio, caste, bravoure, noblesse. Il avait tout d’un grand.
Dernier toro de la féria dacquoise 2009, seul lui fit défaut un opposant inspiré.
Les quelques applaudissements de ceux qui n’étaient pas là que pour l’Agur, ne compenseront pas la vuelta qu’il méritait.
Il se nommait Joyero, sobrero du Conde de Mayalde.

Rafael Finat Riva, le ganadero, annonce un lot de son fer pour la prochaine temporada de la cité thermale.
Qu’ils soient d’origine Ventorillo, Contreras ou issus d’un croisement de ces deux lignées, puissent les frères de Joyero développer les qualités de leur prédécesseur, bien mal récompensé. A ver !!

Miguel de Burdeos

Photo : toroenelcampo

mardi 12 janvier 2010

SUR L'AUTOROUTE

Il est courant d’entendre et de lire à propos de l’encaste Domecq qu’il s’agit du mono encaste. Erreur trouvant son origine soit dans une maîtrise imparfaite de la langue française, soit dans la mauvaise foi de ceux qui la diffuse.
En effet, il n’est pas légitime, à ce jour, de parler de mono encaste alors que d’autres existent encore.
En revanche, on peut, à raison, considérer l’encaste Domecq comme majoritaire et dominateur de l’ensemble de la ganaderia brava. Quelques chiffres traduisent l’évolution récente et la réalité actuelle.


Répartition (en %), par encaste, des toros lidiés, en Espagne et en France, au cours des cinq dernières temporadas

Années

Encastes

2005

2006

2007

2008

2009

DOMECQ

55,42

56,0

58,29

58,30

64,62

MURUBE

5,62

4,3

3,41

2,28

2,79

NUNEZ

12,89

16,4

16,07

15,19

14,17

SALTILLO /
SANTA COLOMA

5,68

6,4

5,16

6,49

5,65

ATANASIO / CONDE DE LA CORTE

9,67

8,6

7,52

6,79

7,02

AUTRES *

10,72

8,3

9,53

10,95

5,74

* MIURA , CUADRI, SAMUEL FLORES, PRIETO DE LA CAL, GALACHE, GUARDIOLA, YONNET … (Source : 6TOROS6)

Devant ce constat, la seule interrogation qui, à mon avis, prévaut est : pourquoi ?
Je proposerai une réponse simple, que certains, sans doute à raison, qualifierons de simpliste !!
Les figuras demandent des toros collaborateurs, le public demande des figuras, les empresas demandent du public, donc les empresas achètent des toros collaborateurs et …… la boucle est bouclée !!!!

L’aficion de masse (à la masse ?) veut des têtes d’affiche et se préoccupe peu, voire pas du tout, de l’origine du bétail. Pourvu qu’il y ait deux cornes et quatre pattes !!!!
Par ailleurs, faute de remplir les arènes, les corridas-concours, source de diversité des encastes, sont une espèce en voie d’extinction (félicitations à l’empresa arlésienne qui en programme deux cette année). Ainsi demain, nous récolterons ce qu’aujourd’hui nous semons : un mono encaste taurin, allant de pair avec une culture et une « bouffe » exclusivement américanisée.

L’autoroute vers la « Domecquisation » du campo est grande ouverte. Les quelques péages, placés de ci de là, à Vic, Céret ou Parentis ne feront que ralentir cette fuite en avant.
Ultime étape précédant la domestication !!
Ojala me equivoco….

Miguel de Burdeos

lundi 11 janvier 2010

5 CONTRE 1

Nicanor Villalta regarde les douces arcades du coso Pignatelli, Francisco Goya contemple l’architecture métissée de la basilique de la Virgen del Pilar et tout au long du paseo del Ebro, las ranillas de métal ne fuient pas au regard des passants trop curieux.

Au début, étaient Arturo Saldivar, novillero mexicain, Esau Fernandez, « Zapatiste de Oro » et Patrick Oliver, le nîmois d’Arganda del Rey.
Mala suerte pour les deux premiers, blessés et malades, remplacés par deux Miguels, de Pablo le madrilène et Cuartero le Mano local. Novillos d’Antonio Palla, les Jandillas du Campo Charro. Fin de féria del Pilar et de temporada Zaragozana 2009.

Après l’arrastre du premier animal et deux hommes blessés, restaient cinq novillos et un novillero. A 5 contre 1, pour sa première sortie avec les hommes à cheval.
Avec sincérité, générosité, courage et honneur, Miguel Cuartero a répondu présent. Une qualité qui se perd et qu’on appelle pundonor.
Un mot pour traduire cette tarde : Respect !!.

Miguel de Burdeos

jeudi 7 janvier 2010

ARENEROS

Au matin de chaque jour du Zapato de Oro, un vieux capote délavé entre les mains, il tente de voler quelques passes à des vaches coloradas égarées dans la rue principale, à la fois prisonnières et maîtresses de l’encierro.

Plus tard, dans la placita, derrière le burladero, il est présent pour, d’un quite salvateur, protéger les jeunes apprentis recortadores.

Por la tarde, il enfile son « habit de lumière », l’universelle tenue blanche et rouge du festayre. Mais, à cette heure, il n’est pas question de fête. Au contraire, les choses sérieuses commencent.
Mettre en marche et maîtriser un système d’arrosage dont je n’ai jamais compris la finalité !!! Censé limiter la poussière dans le ruedo, il est le générateur de larges zones glissantes et boueuses !!!
A l’issue du paseo et après une rapide remise en état de la piste, il retire son couvre-chef en direction du palco présidentiel, signal pour la sortie du mouchoir blanc précédant la sonnerie des clarines.

Patxi est le régent d’un royaume circulaire et sablonneux de quelques mètres carrés de surface. Avec ses trois companeros, entre la lidia de deux novillos, il ratisse. Avec tellement d’ardeur et de concentration qu’il en arrive à percuter violemment son collègue se trouvant malencontreusement sur sa trajectoire. On mésestime souvent la puissance d’un ratisseur lancé à pleine vitesse !!! A Arnedo, les areneros font le spectacle…

Quelques lignes pour un hommage sincère à tous les sombres héros de l’arène.
Ceux qui ratissent, nettoient, bâchent et débâchent.
Aux arènes-héros ….

Miguel de Burdeos


Photo : areneros de Céret / ADAC

lundi 4 janvier 2010

VINGT ANS PLUS TARD

Le pôle nord des contrées taurines a perdu au final de l’an 2006, son cercle de bois et métal qu’on appelait Plaza Goya.

Octobre 92, je découvrais l’arène de Bordeaux-Floirac. Richard Milian donnait l’alternative à Domingo Valderrama. Le lutin guerrier entamait une carrière qui sera faite de combats difficiles, de mauvais coups et d’absence de reconnaissance. Qui n’a pas vu Valderrama affronter un toro plus haut que lui, ne connaît pas le sens du mot « s’arrimer » !!
Francisco Martinez « Paquiro » et Marie Sara, au mieux de sa (de ses) forme(s), complétaient le cartel.

Pour avoir construit une partie de mon aficion sur les planches du coso floiracais.
Pour avoir subit sa démolition sans mot dire, tout en maudissant.
Pour avoir imaginer que quelques taurinos osent investir et s’investissent.
Pour tout cela et alors que le permis de construire de la future Arena de Floirac vient d’être signé, j’ai encore envie d’espérer.

Espérer que cette salle ne servira pas qu’à des lancers de dessous « Madonesque », qu’à des échanges de petites balles jaunes entre tennismen « cocaïnés », qu’à des concerts de vieux rockers fatigués !!!
Espérer que les décideurs locaux actuels, politiques et gestionnaires, sauront faire front comme le firent, il y a deux décennies, leurs prédécesseurs.

2012, fin des travaux. Vingt ans plus tard, le début d’une nouvelle histoire ??……

Aqui en Burdeos,
Con aficion y paciencia,
Esperamos a los toros.

Miguel de Burdeos